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Les fromageries investissent pour conjurer le mauvais sort

L’industrie fromagère lorraine investit 350 millions de francs pour augmenter et sécuriser sa production. Une manière de répondre à la défiance des consommateurs après les récentes épidémies de listériose.

Depuis un an, la filière fromagère lorraine ne ménage pas ses efforts pour développer et sécuriser ses outils de production. Et ce dans un contexte de morosité commerciale liée à une épidémie de listériose qui, depuis plusieurs mois, engendre la défiance des consommateurs à l’égard des produits frais. Sodiaal, dont la filiale Riches Monts est basée Metz, a ainsi consacré 84 millions de francs (12,8 millions d’euros) à la reconstruction de son site de Bénestroff (Moselle) inauguré en avril dernier. Implantée sur 3.000 mètres carrés, la nouvelle usine, qui emploie 400 salariés, assure l’une des plus grosses productions de munster de France.

La coopérative vosgienne l’Ermitage (1,4 milliard de francs, soit 210 millions d’euros de chiffre d’affaires en 1999, avec 950 salariés répartis dans le Doubs, le Jura et la Haute-Marne) achèvera cet automne un investissement de 120 millions de francs (18,3 millions d’euros) dédié à la construction d’un nouvel atelier pour augmenter ses capacités de production de fromages à pâte molle à Bulgnéville (Vosges). La reconstruction d’un atelier d’emballage détruit par un incendie le 4 avril dernier pourrait de surcroît coûter 100 millions de francs (15,24 millions d’euros) au groupe vosgien.

Lactalis modernisera cette année l’ensemble de ses sites lorrains pour 30 millions de francs (4,6 millions d’euros). Enfin, la société Renard-Gillard (100 millions de francs, soit 15,2 millions d’euros de chiffre d’affaires, avec 100 salariés) implantée à Biencourt-sur-Orge, dans la Meuse, a finalisé en 1999 un investissement de 16 millions de francs (2,5 millions d’euros) et recruté 50 salariés pour agrandir ses ateliers et caves d’affinage. Risques surmédiatisés.

Produit fragile, le fromage nécessite des investissements de plus en plus lourds.

Alain Bisval, ingénieur divisionnaire à la direction régionale de l'agriculture et de la forêt

Et qui ne sont malgré tout pas toujours suffisants pour rassurer les consommateurs. L’Ermitage enregistre ainsi une chute moyenne de 5 % de ses ventes d’emmental et de fromages au lait cru depuis le début de l’année. Le groupe Lactalis, qui emploie 619 salariés dans ses quatre sites lorrains (Sorcy, Tonnelles et Réval dans la Meuse et Corcieux dans les Vosges), admet également un fléchissement de ses ventes de pâtes molles et de brie AOC.

Luc-MorelonFortement investis en Lorraine, nous misons sur le retour progressif des consommateurs.

Luc Morelon, directeur de la communication du groupe

La médiatisation excessive des problèmes sanitaires a engendré une chute de 20 % de nos ventes, alors que nous n’avons jamais connu le moindre problème sanitaire.

Jean-François Renard, PDG de la fromagerie Renard-Gillard

Cette entreprise, qui a produit 2.500 tonnes de brie de Meaux AOC en 1999, compense la chute de ses ventes sur le marché français par l’exportation, qui représente 20 % de son chiffre d’affaires essentiellement au Canada et dans les pays scandinaves. Même si les ventes à l’export ne sont pas toujours la panacée. Pour preuve, la fromagerie Hutin (700 millions de francs, soit 106 millions d’euros de chiffre d’affaires) implantée à Dieue-sur-Meuse. Cette société de 312 salariés, qui exporte 90 % de sa production de brie vers l’Allemagne, les Pays-Bas et la Suisse, observe pour sa part une stagnation de la consommation. « Il devient plus difficile de fidéliser le consommateur », constate Serge Mosser, gérant de l’entreprise, qui cherche de nouveaux débouchés en ex-Union soviétique.


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Pascale Braun

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