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La Lorraine s’attaque aux déchets toxiques

Engagé dans trois opérations nationales de collecte des DTQD, le conseil régional de Lorraine s’apprête à mettre en place des dispositifs spécifiques à l’intention des industries de l’ameublement, des déconstructeurs automobiles et des entreprises de second œuvre de BTP.

Nous comptons sur notre territoire bon nombre d’industries lourdes étroitement surveillées, qui sont généralement en mesure de faire face elles-mêmes à leurs problèmes de rejets. Aussi avons-nous pu concentrer nos efforts sur les entreprises artisanales émettant des déchets toxiques sur des sites dispersés.

Patrick Leroux, directeur de l'Agence régionale de l'environnement en Lorraine (Arel) et chef du service environnement de la région

déchets toxiques-BTPDepuis 1996, ses services ont repris et souvent développé des initiatives de collecte engagées au niveau national. La région a ainsi participé à la Moisson d’automne, consistant à récupérer auprès de 12 000 agriculteurs des quatre départements quelque 40 tonnes de produits phytosanitaires non utilisés. L’Arel a également pris le relais de l’opération Bidon futé, consistant à collecter les produits toxiques entreposés dans les lycées et centres de formation des apprentis.

Nous sommes allés bien au-delà de la simple collecte. La situation nous paraissait si préoccupante que nous avons défini un plan sur trois ans pour éviter la reconstitution de stocks dangereux.

Michaël Clément

Michaël Clément, chargé d’études pollutions et nuisances à l’Arel, dépeint de dangereuses juxtapositions de sodium, de mercure, de plomb et autres produits toxiques, explosifs ou inflammables entreposés depuis plusieurs décennies dans les armoires des salles de chimie. Encore ne s’agissait-il là que de produits « pouvant encore servir ». Le contenu des éprouvettes était généralement vidé dans l’évier et les résidus toxiques jetés à la poubelle. Le volet technique de Bidon futé a consisté à vider les armoires et à mettre à disposition des 240 établissements concernés des bidons – rouges pour les matières organiques, jaunes pour les substances minérales – régulièrement collectés par une entreprise spécialisée. Le second volet est axé sur la pédagogie :

Nous avons édité une brochure à l’usage des enseignants pour les sensibiliser aux dangers du stockage ou de l’évacuation incontrôlée des produits toxiques. Nous nous sommes ensuite adressés aux lycéens. Nous leur avons distribué un petit disque cartonné leur indiquant les produits dangereux, tant dans la vie professionnelle que pour les usages domestiques. Cette démarche s’inscrit dans notre objectif essentiel, qui consiste à faire évoluer durablement les comportements. Si les lycéens prennent l’habitude de trier les déchets toxiques, ils pérenniseront ces pratiques plus tard, au travail.

Patrick Leroux

De l’opération Bidon futé a fort logiquement découlé « Pressing propre », lancé par la région début 1997 avant d’être repris par d’autres régions. Organisée avec le concours de la chambre des métiers de Lorraine, l’Union régionale de l’entretien technique, la Drire et l’agence de l’eau Rhin-Meuse, cette campagne a permis de collecter les boues de perchloréthylènes jusqu’alors écoulées dans les ordures ménagères ou dans les égouts. Près de la moitié des entreprises concernées ont souscrit à l’opération, atteignant ainsi en six mois l’objectif fixé sur deux ans. Un matériel de publicité sur le lieu de vente signale les pressings propres, qui ont investi 250 francs dans l’opération.

Les chefs d’entreprise les mieux informés sont tout disposés à payer : ils savent qu’ils devront bientôt s’acquitter d’une surtaxe s’ils ne respectent pas les normes.

Patrick Leroux

Une étude rédigée en 1996 a mis en évidence trois autres secteurs d’activité connaissant de grosses lacunes en matière de DTQD : les entreprises d’ameublement (pour les vernis, décapants, peintures, solvants) ; les déconstructeurs automobiles (liquide de lavage des vitres et de refroidissement, huile de moteurs et de boîtes de vitesse, batteries) ; les entreprises de second œuvre du BTP (peintures et solvants). Le projet le plus avancé concerne 500 entreprises artisanales du bois regroupées dans la région de Mirecourt et de Neufchâteau, qui devraient se voir proposer, dès le mois de novembre, un dispositif de collecte des déchets toxiques.


Déconstructeurs civiques

Une quinzaine des 70 déconstructeurs établis en Lorraine se disent prêts à veiller de manière plus stricte aux normes en vigueur. Avant d’être broyé, le véhicule hors d’usage doit être purgé de tous ses liquides, faute de quoi les résidus ne sont pas valorisables. Encore faut-il que la vidange ne s’effectue pas dans le cours d’eau attenan.

Il existe des dispositifs spécifiques pour les garagistes, mais si nous parvenons à structurer la collecte des déchets des déconstructeurs, cela constituera une première nationale.

Patrick Leroux

L’Arel compte éditer en début d’année prochaine un guide des déchets toxiques à l’usage des élus, et travaille, avec les communes du bassin nancéien, à une initiative visant à ouvrir aux artisans l’accès aux décharges.

On ne peut pas accuser les artisans de polluer, si aucun dispositif n’est mis en place pour traiter leurs déchets.

Patrick Leroux


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Pascale Braun

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