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Dix ans de solidarité entre Nancy et la Roumanie

Souvent exprimés de manière spectaculaire – durant la crise du Kosovo, les associations d’aide humanitaire durent demander aux Nancéiens de suspendre leurs dons devenus ingérables -, les liens entre la cité des Ducs et les pays de l’est reposent à la fois sur une relative proximité géographique, une longue histoire méconnue de Lorrains venus peupler l’empire Habsbourg-Lorraine, dès le milieu du XVIIIe siècle, et sur un concours de circonstances.

Conseiller du maire depuis 1983, Jean-Luc Rivière, fin connaisseur des pays de l’Est depuis 25 ans, se trouvait aux premières loges de l’effondrement de la dictature roumaine à Timisoara dès le 22 décembre 1989. A son retour, la mairie le nomme président de l’Anar (Association nancéienne d’aide à la Roumanie) pour juger de la pertinence et de la viabilité des projets présentés par les bénévoles. Subventionnée par la ville, l’Anar finançait elle-même les projets les plus fiables.

Nous n’avons jamais mis en place de procédure de contrôle des fonds, mais mes fréquents séjours en Roumanie me permettaient de vérifier sur place la concrétisation des projets.

Jean-Luc Rivière

Née dans le sillage de cet élan de solidarité, l’association nancéienne Humaniraid démontre depuis 10 ans une grande fidélité à sa vocation initiale d’aide aux orphelins roumains. Assurée du soutien de la municipalité, elle ne sollicite pourtant que très rarement son aide. La première demande de subvention remonte à 1994, lorsque des habitants de Castanilor, dans la partie moldave de la Roumanie, signalent aux membres d’Humaniraid un petit orphelinat dans lequel soixante enfants survivent dans des conditions déplorables. Horrifiés par les matelas pourris sur lesquels dorment les orphelins, les membres de l’association demandent immédiatement 15 000 francs à la mairie pour fournir à l’établissement une literie neuve.

Après cette aide d’urgence, nous avons acheté quatre machines à laver et une essoreuse par nos propres moyens, avant de financer la construction de sanitaires neufs par une entreprise locale.

Stéphane Harter, responsable de la communication de l'association

Depuis, la ville de Nancy n’intervient plus que pour délivrer les accréditations nécessaires à l’obtention des visas avant chaque raid, et prêter du matériel à l’occasion de concerts de soutien offerts par des chorales locales.

Nous misons sur nos propres compétences et sur des partenariats avec des institutions et associations meurthe-et-mosellanes et roumaines. En dehors des urgences, il ne nous paraît pas nécessaire de solliciter l’aide financière de la mairie, d’autant que les procédures sont longues et fastidieuses.

Françoise Carpena, présidente de l'association

Reconnue par les institutions roumaines, l’association s’inscrit dans le programme de lutte contre l’abandon lancé par le gouvernement.

Sous la dictature, la contraception était totalement interdite, mais le gouvernement encourageait l’abandon à grande échelle. En théorie, les parents pouvaient récupérer leurs enfants quelques années plus tard. Nous avons apporté un soutien matériel et psychologique aux familles qui ont franchi le pas. Nous aidons également les foyers qui acceptent d’accueillir les enfants réellement abandonnés. Enfin, nous encourageons les parrainages. Aujourd’hui, l’orphelinat de Castanilor ne compte plus que trente enfants, dans un bâtiment entièrement rénové.

Françoise Carpena

En Meurthe-et-Moselle, Humaniraid s’est associée à l’Institut des jeunes aveugles de Nancy dont les membres nettoient, réparent et emballent tout au long de l’année les vêtements, peluches et jouets apportés à l’orphelinat par cartons entiers. Au fil de sa coopération avec la Roumanie, l’association a découvert le mystère tragique des enfants atteints du sida. Pour des raisons encore indéfinies – perfusions systématiques pour « requinquer » les nourrissons abandonnés, expérimentations in vivo ? – la moitié des enfants séropositifs d’Europe se trouvent en Roumanie. Humaniraid coopère avec l’association française de soutien aux sidéens et à leur famille « Dessine-moi un mouton », l’association nancéienne d’accueil au malade Tabgah et avec le centre hospitalier universitaire de Nancy-Brabois pour venir en aide à l’association roumaine Aras, qui gère deux centres d’hébergement d’enfants sidéens de 300 et 500 places. Un professeur et une pédiatre du CHUR sont ainsi partis en mission cet été.


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Pascale Braun

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